Risque de dysthyroïdies dans le milieu agricole
Résumé
Introduction
L’épidémiologie des dysthyroïdies dans la population agricole française n’a jamais été étudiée, en particulier selon les types d’activité agricole. Ainsi, nous avons investigué si, parmi toutes les activités agricoles, certaines étaient associées à un risque accru d’hypothyroïdie et d’hyperthyroïdie.
Matériels et méthodes
Le régime agricole de sécurité sociale, dont l’opérateur est la MSA (Mutualité sociale agricole), assure l’ensemble de la population agricole française et collecte dans différentes bases de données médico-administratives des informations sur ses assurés et les prestations dont ils bénéficient. Dans le cadre du projet TRACTOR (Tracking and monitoring occupational risks in agriculture, détecter et surveiller les risques professionnels dans le monde agricole), plusieurs bases de données de la MSA ont été croisées. Ainsi, des données sur les activités agricoles pour la période 2002 à 2006 et d’autres sur le remboursement de soin pour la période 2012–2016 ont été colligées. À partir de ces données, des modèles de Cox ont été utilisés pour estimer les risques (HR) de dysthyroïdies de 26 activités agricoles, en utilisant la date de premier remboursement de médicaments contre les dysthyroïdies comme échelle de temps. Toutes les analyses ont été ajustées sur l’âge, le sexe, l’année d’installation, le nombre de comorbidités, et le département de résidence. Pour chaque modèle (activité), le groupe de référence correspondait à l’ensemble des non-salariés agricoles n’ayant pas réalisé l’activité concernée.
Résultats
L’étude portait sur 1 088 561 non-salariés agricoles. Trente et un mille huit cent trente-quatre cas d‘hypothyroïdie et 620 cas d’hyperthyroïdie ont été identifiés entre 2012–2016. Les activités liées à l’élevage bovin présentaient les risques les plus élevés de dysthyroïdies, que ce soit pour l’hyperthyroïdie (HR variant 1,75 à 2,42) ou l’hypothyroïdie (HR variant de 1,41 à 1,44). Concernant l’hypothyroïdie, des surrisques pour d’autres activités d’élevage (porcin, volaille et lapin), ainsi que pour l’arboriculture ont été mis en évidence. À l’inverse, les grandes cultures et les activités impliquant des chevaux étaient associées à des sous-risques. Des différences de risque selon le sexe ont été observées pour 8 activités, avec notamment un risque accru chez les viticulteurs hommes.
Conclusion
Certaines activités agricoles exposent les non-salariés agricoles à des risques de dysthyroïdie. Des investigations complémentaires sont toutefois nécessaires pour confirmer ces résultats et identifier les déterminants professionnels (facteurs de risque/protection) contribuant aux associations mises en évidence afin de déterminer des stratégies de prévention adaptées.