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Membres du groupe

  • Bertrand TOUSSAINT (Enseignant-Chercheur Praticien Hospitalier UGA, CHUGA)
  • Audrey LE GOUELLEC (Enseignant-Chercheur Praticien Hospitalier UGA, CHUGA), responsable de Groupe
  • Caroline PLAZY (Enseignant-Chercheur CDD UGA, Assistante Hospitalo-universitaire CHUGA)
  • Razak TIDJANI (Enseignant-Chercheur CDD UGA)
  • Clément CAFFARATTI (Doctorant UGA)
  • Alexandre TRONEL (Doctorant CIFRE UGA Société Pelican Health)
  • Charles TERRA (Doctorant en co-direction avec O. Terrier, CIRI (Lyon))
  • Paul AHAVI (Doctorant en co-direction avec JL Faulon, INRAE Micalis (Jouy-en-Josas))

Collaborateurs au sein de l’équipe TrEE

  • Valérie CUNIN (Ingénieur Hospitalier CHUGA)
  • Candice TROCME (Ingénieur Hospitalier CHUGA)
  • Sylvie BERTHIER (Ingénieur Hospitalier CHUGA)
  • Nelle Varoquaux (Chercheur CNRS)
  • Dalil Hannani (Chercheur CNRS)

Collaborations

  • Ina Attree (CEA Grenoble, France)
  • François Fenaille (CEA Saclay, France)
  • Florence Fauvelle (GIN, Grenoble, France)
  • Sophie Bleves (Aix-Marseille Université, France)
  • Pieter Dorrestein Lab (UCSD, San Diego, USA)
  • Rob Quinn (Department of Biochemistry, Michigan University, USA)
  • Mustapha Si-Tahar (Université de Tours, France)
  • Jean Loup Faulon (INRAE Micalis, France)
  • Olivier Terrier (CIRI Lyon, France)
  • Daniel Petras (Tubingen, Allemagne)
  • Louis Felix Nothias (Wolfenger lab, Suisse)
  • Ivanisevic Julijana (Université de Lausanne, Suisse)
  • Julien Boccard et Pr Serge Rudaz (Université de Genève, Suisse)

Métabolomique et Bactérie            

Le dialogue Homme-microbe : Bactéries amies ou ennemies de l’homme ?       

Les bactéries, de part, leur découverte et leur histoire, ont longtemps été considérées comme des pathogènes humains avant tout. En tous cas, c’est par ce biais là qu’elles occupent majoritairement l’espace médiatique (infections EHEC, etc…). Or, l’avènement récent de la métagénomique, nous a permis de prendre conscience qu’elles sont également une part importante de nous-même, notamment via leur présence au sein de notre microbiote. Depuis des décennies, l’étude de la virulence des pathogènes bactériens humains avaient permis de mettre en évidence les déterminants moléculaires à l’origine de la virulence de ces espèces. Les questions qui restent en suspens et que notre groupe essaye d’adresser, sont les suivantes :

  • Pourquoi des bactéries du microbiote ne provoquent ‘elles pas de réponse immunitaire ?
  • Comment des pathogènes humains peuvent coloniser nos tissus et donc persister ?
  • Quel est la part de l’environnement dans la tolérance de ces agents bactériens du microbiote ou pathogène ?

Pour tenter de répondre à ces questions, nous utilisons comme modèles d’étude les infections chroniques à P. aeruginosa et plus récemment le microbiote, ainsi que des approches de biologie de synthèse et de métabolomique ciblée et non ciblée par spectrométrie de masse. Nous avons fait une revue récente de toutes les métabolites qui ont été décrits comme important dans le dialogue entre les bactéries du microbiote et l’immunité de l’hôte (Caffaratti et al. 2021) (Figure 1).

Figure 1 : Revue de la littérature sur le métabolites du microbiote connus pour interférer avec l’immunité de l’hôte. La métabolomique est un moyen d’étudier les métabolites de ce dialogue. Les développements récents et l’utilisation des réseaux moléculaires permet de mettre en évidence de nouveaux métabolites bioactifs pertinents (Caffaratti et al. 2021 ; Nothias et al. 2020, Jarmush et al. 2020).

Historique de nos contributions et projets en cours           

Notre équipe travaille, en collaboration avec d’autres équipes, depuis plus de 20 ans à la compréhension des mécanismes de virulence de Pseudomonas aeruginosa, et notamment sur la régulation de l’expression du système de sécrétion de type 3 (SST3). Parmi les nombreux autres facteurs de virulence chez P. aeruginosa, le système de sécrétion de type 3 est le facteur de virulence principale de P. aeruginosa. Il est assimilable à une seringue macromoléculaire composée d’une vingtaine de protéines permettant l’injection de toxines (exotoxines S, T, Y et U) directement dans les cellules de l’hôte infecté.

 

Notre équipe a contribué à décrire des mécanismes de régulations du système de sécrétion de type 3 de P. aeruginosa et à mieux comprendre les facteurs moléculaires de dialogue entre P. aeruginosa et les cellules de l’immunité. Plus récemment, l’utilisation de la métabolomique non ciblée nous a permis de mettre en évidence l’importance de l’environnement métabolique pour l’orientation de la réponse immune vis à vis de P. aeruginosa. Voici quelques exemples de contribution dans le domaine :

  • Modèle d’infection à P. aeruginosa et empreinte métabolique de poumon infecté avec des souches de différents degrés de virulence

Pour pouvoir étudier la virulence de P. aeruginosa, nous avons mis au point un modèle d’infection pulmonaire aiguë à P. aeruginosa et développé une méthode pour suivre le degré de sévérité de l’atteinte pulmonaire après infection en réalisant une empreinte métabolique par spectroscopie par résonance magnétique nucléaire à angle magique à haute résolution (ou HR-MAS RMN) après  infection en collaboration avec le Dr F. Fauvelle (Laboratoire GIN, France) (Le Gouellec et al. 2018).

  • Rôle des métabolites du tryptophane dans l’ interaction entre P. aeruginosa et l’immunité de l’hôte

Nous avons mis en évidence l’existence d’un signal diffusible impliqué dans la répression du SST3. Ce signal (nommé PARST pour « Pseudomonas autorepressor of secretion three ») est indépendant des molécules du QS connues à ce jour chez P. aeruginosa. Il dépendait en revanche de la synthèse du tryptophane (du gène trpA) mais ce n’était pas le tryptophane, connu par ailleurs pour être le précurseur de plusieurs molécules-signal dont l'indole-3-acide acétique (IAA) et la kynurénine. Nous avons démontré en utilisant la chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse et différentes souches mutantes de P. aeruginosa, que P. aeruginosa produit in vitro dans le milieu de croissance, différents métabolites dérivés du tryptophane, et montré la pertinence de cette production in vivo dans un modèle murin d’infection pulmonaire aiguë (Bortolotti et al. 2016). Nous avons démontré l’existence de la voie de la kynurénine chez P. aeruginosa, voie essentielle à la production d'anthranilate, un précurseur important de certains facteurs de virulence de P. aeruginosa, comme la synthèse du PQS, molécule du QS spécifique de P. aeruginosa. Les métabolites (anthranilate, kynurénine, acide kynurénique) sont produits à des niveaux élevés à la fois ex vivo et in vivo par P. aeruginosa. Or, la kynurénine est connue pour jouer un rôle dans la modulation de l’immunité adaptative chez l’homme. C’est un ligand AhR bien connu. Nous avons regardé l’influence exercée par cette nouvelle famille de molécules bactériennes sur l’interaction hôte-pathogène. Nous avons montré que la plupart des souches de P. aeruginosa isolées de patients atteints de mucoviscidose produisent un niveau élevé de kynurénine et possèdent le gène kynA, homologue de l’indoléamine 2,3 dioxygénase (IDO) chez l’homme. Pendant son travail de thèse C. Genestet, a démontré que la voie de la kynurénine permet à P. aeruginosa de contourner la réponse immunitaire innée en piégeant la production d'ERO produite par les neutrophiles (Genestet et al. 2014). 

  • Intérêt de la métabolomique non ciblée pour l’étude des molécules de dialogue entre P. aeruginosa et les cellules de l’immunité

L’avènement de la génomique, a été utile pour identifier les adaptations génétiques de P. aeruginosa au poumon de patient atteint de mucoviscidose. Cependant, étant donné la complexité des différents niveaux de régulation des organismes vivants (mutations dans des zones non codantes, des régulation post-transcriptionnelle, post-traductionnelle, cinétique enzymatique, etc.), les corrélations entre les mutations sur le génome et leurs effets sur les phénotypes pertinents, tels que leur résistance aux antibiotiques ou leur profil de virulence, restent difficiles à trouver. De plus, des études récentes ont montré que des adaptations métaboliques convergentes (en termes de phénotype) de souches infectant des patients indépendants pouvaient être obtenues par des voies distinctes (La Rosa et al. 2018). Par ailleurs, des isolats avec des séquences génomiques presque identiques prélevés chez différents patients pouvaient exprimer des profils transcriptomiques, métaboliques et phénotypiques très divergents. Ensemble, ces résultats ont mis en évidence la nécessité d'obtenir une vision plus fonctionnelle de l'évolution de P. aeruginosa. au sein de l'hôte, afin d'établir des liens entre les adaptations bactériennes, l'expression de phénotypes cliniquement pertinents et l'impact final de l'infection sur l'état de santé du patient. Pour atteindre cet objectif, la métabolomique (qui fait référence à la mesure des petites molécules, ou métabolites, présentes dans un système biologique) constitue un outil prometteur car elle permet d'obtenir à un temps donné le résultat de l’expression des activités métaboliques bactériennes (Depke, T., et al. Biomolecules 10, 1041 (2020); Mielko, K. A. et al.. World J. Microbiol. Biotechnol. 35, 178 (2019)). La comparaison des profils métabolomiques de P. aeruginosa obtenus au cours d'une infection fournit donc une vision fonctionnelle de l'adaptation bactérienne à l'environnement pulmonaire du patient muco, au plus près du phénotype. Des études précédentes avaient montré le potentiel de la métabolomique pour étudier l'adaptation métabolique de P. aeruginosa pendant les infections chroniques(Behrends, V. et al. Env. Microbiol 15, 398–408 (2013)) ainsi que le lien entre les profils métaboliques et les phénotypes bactériens (Behrends, V. et al. J Biol Chem 288, 15098–15109 (2013).; Borgos, S. E. F. et al. Ann. Microbiol. 65, 891–898 (2015)). Dans le travail de thèse d’O. Moyne (Moyne et al. 2020), nous avons récupéré entre 3 et 5 isolats de P. aeruginosa par patients muco adulte, sur la période 2010-2015 en collaboration avec le service de bacteriologie du CHU Grenoble Alpes. Le génotypage au PFGE, nous a permis de confirmer l’appartenance des isolats à même complexe clonal selon la définition de Römling et al., c’est à dire entre 1 et 6 bandes de différences (Figure 2, puis confirmation par MLST et 16S). Des patients différents partagent des souches qui appartiennent à un même complexe clonal (par ex, 2 fratries différentes (patient 2 et 3, et 127 et 128) alors que d’autres n’ont aucun lien familial. Ces isolats précoces et tardifs sont donc des représentants d’une même lignée évolutive chez un patient donné. Nous avons alors sélectionné les isolats précoces et tardifs pour 32 patients.