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Membres du groupe

  • Bertrand TOUSSAINT (Enseignant-Chercheur Praticien Hospitalier UGA, CHUGA)
  • Audrey LE GOUELLEC (Enseignant-Chercheur Praticien Hospitalier UGA, CHUGA), responsable de Groupe
  • Caroline PLAZY (Enseignant-Chercheur CDD UGA, Assistante Hospitalo-universitaire CHUGA)
  • Razak TIDJANI (Enseignant-Chercheur CDD UGA)
  • Clément CAFFARATTI (Doctorant UGA)
  • Alexandre TRONEL (Doctorant CIFRE UGA Société Pelican Health)
  • Charles TERRA (Doctorant en co-direction avec O. Terrier, CIRI (Lyon))
  • Paul AHAVI (Doctorant en co-direction avec JL Faulon, INRAE Micalis (Jouy-en-Josas))

Collaborateurs au sein de l’équipe TrEE

  • Valérie CUNIN (Ingénieur Hospitalier CHUGA)
  • Candice TROCME (Ingénieur Hospitalier CHUGA)
  • Sylvie BERTHIER (Ingénieur Hospitalier CHUGA)
  • Nelle Varoquaux (Chercheur CNRS)
  • Dalil Hannani (Chercheur CNRS)

Collaborations

  • Ina Attree (CEA Grenoble, France)
  • François Fenaille (CEA Saclay, France)
  • Florence Fauvelle (GIN, Grenoble, France)
  • Sophie Bleves (Aix-Marseille Université, France)
  • Pieter Dorrestein Lab (UCSD, San Diego, USA)
  • Rob Quinn (Department of Biochemistry, Michigan University, USA)
  • Mustapha Si-Tahar (Université de Tours, France)
  • Jean Loup Faulon (INRAE Micalis, France)
  • Olivier Terrier (CIRI Lyon, France)
  • Daniel Petras (Tubingen, Allemagne)
  • Louis Felix Nothias (Wolfenger lab, Suisse)
  • Ivanisevic Julijana (Université de Lausanne, Suisse)
  • Julien Boccard et Pr Serge Rudaz (Université de Genève, Suisse)

Métabolomique et Bactérie            

Le dialogue Homme-microbe : Bactéries amies ou ennemies de l’homme ?       

Les bactéries, de part, leur découverte et leur histoire, ont longtemps été considérées comme des pathogènes humains avant tout. En tous cas, c’est par ce biais là qu’elles occupent majoritairement l’espace médiatique (infections EHEC, etc…). Or, l’avènement récent de la métagénomique, nous a permis de prendre conscience qu’elles sont également une part importante de nous-même, notamment via leur présence au sein de notre microbiote. Depuis des décennies, l’étude de la virulence des pathogènes bactériens humains avaient permis de mettre en évidence les déterminants moléculaires à l’origine de la virulence de ces espèces. Les questions qui restent en suspens et que notre groupe essaye d’adresser, sont les suivantes :

  • Pourquoi des bactéries du microbiote ne provoquent ‘elles pas de réponse immunitaire ?
  • Comment des pathogènes humains peuvent coloniser nos tissus et donc persister ?
  • Quel est la part de l’environnement dans la tolérance de ces agents bactériens du microbiote ou pathogène ?

Pour tenter de répondre à ces questions, nous utilisons comme modèles d’étude les infections chroniques à P. aeruginosa et plus récemment le microbiote, ainsi que des approches de biologie de synthèse et de métabolomique ciblée et non ciblée par spectrométrie de masse. Nous avons fait une revue récente de toutes les métabolites qui ont été décrits comme important dans le dialogue entre les bactéries du microbiote et l’immunité de l’hôte (Caffaratti et al. 2021) (Figure 1).

Figure 1 : Revue de la littérature sur le métabolites du microbiote connus pour interférer avec l’immunité de l’hôte. La métabolomique est un moyen d’étudier les métabolites de ce dialogue. Les développements récents et l’utilisation des réseaux moléculaires permet de mettre en évidence de nouveaux métabolites bioactifs pertinents (Caffaratti et al. 2021 ; Nothias et al. 2020, Jarmush et al. 2020).

Historique de nos contributions et projets en cours           

Notre équipe travaille, en collaboration avec d’autres équipes, depuis plus de 20 ans à la compréhension des mécanismes de virulence de Pseudomonas aeruginosa, et notamment sur la régulation de l’expression du système de sécrétion de type 3 (SST3). Parmi les nombreux autres facteurs de virulence chez P. aeruginosa, le système de sécrétion de type 3 est le facteur de virulence principale de P. aeruginosa. Il est assimilable à une seringue macromoléculaire composée d’une vingtaine de protéines permettant l’injection de toxines (exotoxines S, T, Y et U) directement dans les cellules de l’hôte infecté.

 

Notre équipe a contribué à décrire des mécanismes de régulations du système de sécrétion de type 3 de P. aeruginosa et à mieux comprendre les facteurs moléculaires de dialogue entre P. aeruginosa et les cellules de l’immunité. Plus récemment, l’utilisation de la métabolomique non ciblée nous a permis de mettre en évidence l’importance de l’environnement métabolique pour l’orientation de la réponse immune vis à vis de P. aeruginosa. Voici quelques exemples de contribution dans le domaine :

  • Modèle d’infection à P. aeruginosa et empreinte métabolique de poumon infecté avec des souches de différents degrés de virulence

Pour pouvoir étudier la virulence de P. aeruginosa, nous avons mis au point un modèle d’infection pulmonaire aiguë à P. aeruginosa et développé une méthode pour suivre le degré de sévérité de l’atteinte pulmonaire après infection en réalisant une empreinte métabolique par spectroscopie par résonance magnétique nucléaire à angle magique à haute résolution (ou HR-MAS RMN) après  infection en collaboration avec le Dr F. Fauvelle (Laboratoire GIN, France) (Le Gouellec et al. 2018).

  • Rôle des métabolites du tryptophane dans l’ interaction entre P. aeruginosa et l’immunité de l’hôte

Nous avons mis en évidence l’existence d’un signal diffusible impliqué dans la répression du SST3. Ce signal (nommé PARST pour « Pseudomonas autorepressor of secretion three ») est indépendant des molécules du QS connues à ce jour chez P. aeruginosa. Il dépendait en revanche de la synthèse du tryptophane (du gène trpA) mais ce n’était pas le tryptophane, connu par ailleurs pour être le précurseur de plusieurs molécules-signal dont l'indole-3-acide acétique (IAA) et la kynurénine. Nous avons démontré en utilisant la chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse et différentes souches mutantes de P. aeruginosa, que P. aeruginosa produit in vitro dans le milieu de croissance, différents métabolites dérivés du tryptophane, et montré la pertinence de cette production in vivo dans un modèle murin d’infection pulmonaire aiguë (Bortolotti et al. 2016). Nous avons démontré l’existence de la voie de la kynurénine chez P. aeruginosa, voie essentielle à la production d'anthranilate, un précurseur important de certains facteurs de virulence de P. aeruginosa, comme la synthèse du PQS, molécule du QS spécifique de P. aeruginosa. Les métabolites (anthranilate, kynurénine, acide kynurénique) sont produits à des niveaux élevés à la fois ex vivo et in vivo par P. aeruginosa. Or, la kynurénine est connue pour jouer un rôle dans la modulation de l’immunité adaptative chez l’homme. C’est un ligand AhR bien connu. Nous avons regardé l’influence exercée par cette nouvelle famille de molécules bactériennes sur l’interaction hôte-pathogène. Nous avons montré que la plupart des souches de P. aeruginosa isolées de patients atteints de mucoviscidose produisent un niveau élevé de kynurénine et possèdent le gène kynA, homologue de l’indoléamine 2,3 dioxygénase (IDO) chez l’homme. Pendant son travail de thèse C. Genestet, a démontré que la voie de la kynurénine permet à P. aeruginosa de contourner la réponse immunitaire innée en piégeant la production d'ERO produite par les neutrophiles (Genestet et al. 2014). 

  • Intérêt de la métabolomique non ciblée pour l’étude des molécules de dialogue entre P. aeruginosa et les cellules de l’immunité

L’avènement de la génomique, a été utile pour identifier les adaptations génétiques de P. aeruginosa au poumon de patient atteint de mucoviscidose. Cependant, étant donné la complexité des différents niveaux de régulation des organismes vivants (mutations dans des zones non codantes, des régulation post-transcriptionnelle, post-traductionnelle, cinétique enzymatique, etc.), les corrélations entre les mutations sur le génome et leurs effets sur les phénotypes pertinents, tels que leur résistance aux antibiotiques ou leur profil de virulence, restent difficiles à trouver. De plus, des études récentes ont montré que des adaptations métaboliques convergentes (en termes de phénotype) de souches infectant des patients indépendants pouvaient être obtenues par des voies distinctes (La Rosa et al. 2018). Par ailleurs, des isolats avec des séquences génomiques presque identiques prélevés chez différents patients pouvaient exprimer des profils transcriptomiques, métaboliques et phénotypiques très divergents. Ensemble, ces résultats ont mis en évidence la nécessité d'obtenir une vision plus fonctionnelle de l'évolution de P. aeruginosa. au sein de l'hôte, afin d'établir des liens entre les adaptations bactériennes, l'expression de phénotypes cliniquement pertinents et l'impact final de l'infection sur l'état de santé du patient. Pour atteindre cet objectif, la métabolomique (qui fait référence à la mesure des petites molécules, ou métabolites, présentes dans un système biologique) constitue un outil prometteur car elle permet d'obtenir à un temps donné le résultat de l’expression des activités métaboliques bactériennes (Depke, T., et al. Biomolecules 10, 1041 (2020); Mielko, K. A. et al.. World J. Microbiol. Biotechnol. 35, 178 (2019)). La comparaison des profils métabolomiques de P. aeruginosa obtenus au cours d'une infection fournit donc une vision fonctionnelle de l'adaptation bactérienne à l'environnement pulmonaire du patient muco, au plus près du phénotype. Des études précédentes avaient montré le potentiel de la métabolomique pour étudier l'adaptation métabolique de P. aeruginosa pendant les infections chroniques(Behrends, V. et al. Env. Microbiol 15, 398–408 (2013)) ainsi que le lien entre les profils métaboliques et les phénotypes bactériens (Behrends, V. et al. J Biol Chem 288, 15098–15109 (2013).; Borgos, S. E. F. et al. Ann. Microbiol. 65, 891–898 (2015)). Dans le travail de thèse d’O. Moyne (Moyne et al. 2020), nous avons récupéré entre 3 et 5 isolats de P. aeruginosa par patients muco adulte, sur la période 2010-2015 en collaboration avec le service de bacteriologie du CHU Grenoble Alpes. Le génotypage au PFGE, nous a permis de confirmer l’appartenance des isolats à même complexe clonal selon la définition de Römling et al., c’est à dire entre 1 et 6 bandes de différences (Figure 2, puis confirmation par MLST et 16S). Des patients différents partagent des souches qui appartiennent à un même complexe clonal (par ex, 2 fratries différentes (patient 2 et 3, et 127 et 128) alors que d’autres n’ont aucun lien familial. Ces isolats précoces et tardifs sont donc des représentants d’une même lignée évolutive chez un patient donné. Nous avons alors sélectionné les isolats précoces et tardifs pour 32 patients.

 

Figure 2 : Collecte temporelle et génotypage par électrophorèse en champ pulsé (PFGE) des isolats cliniques de P. aeruginosa responsables de l'infection pulmonaire chronique chez les patients atteints de mucoviscidose. (a) Exemple représentatif de gels PFGE (pulsotypes) d'isolats cliniques de P. aeruginosa prélevés chez les patients 60 et 141 (1, 2 et 3 représentent le moment d'échantillonnage de chaque isolat : début, milieu ou fin de la période de suivi 2010-2015, respectivement ; M = taille du fragment marqueur). (b) Résultats du PFGE et comparaison par paires de 122 pulsotypes de P. aeruginosa. Les complexes clonaux (CC) et les clones ont été définis selon les critères de Römling et al.: aucun lien clonal si les pulsotypes présentaient plus de 6 bandes différentes, complexe clonal (CC) si les pulsotypes présentaient moins de 6 bandes différentes, et clonal si les pulsotypes étaient identiques. (c) Série temporelle d'isolats génotypés par PFGE prélevés dans les expectorations des patients entre 2010 et 2015. Les petites croix grises représentent tous les points temporels d'isolement de P. aeruginosa. entre 2010 et 2015 pour chaque patient. La forme des plus gros points représente le CC des isolats qui ont été analysés par PFGE (les clones uniques sont représentés par une croix noire). Pour 32/34 patients, les isolats les plus anciens et les plus récents appartenant à un même CC ont été sélectionnés pour la banque cellulaire finale.

 

  • Rôle des polyamines dans la virulence et la sévérité de l’infection chronique à P. aeruginosa

Afin de mettre en évidence les signatures métaboliques potentielles ayant une pertinence clinique, nous avons également analysé les profils métaboliques de P. aeruginosa. Soixante-six isolats de P. aeruginosa ont été décrits à l’aide de 2 blocs de données : les intensités des métabolites obtenus par LC-HRMS (n=151 métabolites sélectionnés) (Figure 3b,c,f partie gauche), et la présence/absence des 6 phénotypes de virulence : la cytotoxicité sur les macrophages (J774) et les cellules épithéliales (A549), la réponse au stress des cellules épithéliales induite par l'infection par P. aeruginosa, la formation de colonies mucoïdes, la production de pigments et le taux de croissance bactérienne (Figure 3d,e,f partie droite).

Concernant, les analyses métabolomiques, l'analyse HCPC des 151/272 métabolites sélectionnés a conduit à l'identification de 3 groupes d'isolats de P. aeruginosa présentant des profils métaboliques similaires, qui seront ci-après appelés métabotypes (Figure 4b). Les 10 métabolites les plus significatifs associés à ces 3 métabotypes ont été identifiés (analyse de variance à sens unique (ANOVA) test F valeur p  < 0,05). Afin de placer ces données dans une perspective biologique, les voies métaboliques associées à ces métabolites ont été déduites en utilisant la base de données Pseudomonas aeruginosa metabolome database ou PAMDB.

Ces résultats ont mis en évidence les métabolites impliqués dans le métabolisme des polyamines (par exemple, la putrescine, spermidine) comme étant fortement discriminants entre les différents métabotypes de P. aeruginosa (Figure 4c,g, test t de Student apparié, FDR ajusté < 0,05, sauf pour le niveau de spermidine entre le métabotype 2 et 3, p = 0.076). Ces molécules sont présentes dans tous les organismes vivants et sont notamment impliquées dans la croissance cellulaire. Les principales polyamines retrouvées chez les bactéries sont la putrescine, la spermidine et la cadavérine.

Afin d'accéder aux relations entre les métabotypes de P. aeruginosa et les propriétés de virulence de chaque isolat, nous avons étudié six phénotypes différents : la cytotoxicité sur les macrophages (J774) et les cellules épithéliales (A549), la réponse au stress des cellules épithéliales induite par l'infection par P. aeruginosa, la formation de colonies mucoïdes, la production de pigments et le taux de croissance bactérienne. Les résultats expérimentaux ont été convertis en une matrice binaire de présence/absence et analysés de manière multivariée par l'analyse HCPC. Le regroupement HCPC a révélé 3 groupes d'isolats qui peuvent être définis en fonction de leur niveau relatif de virulence (Figure 3d).

 

 

Figure 3 : L'analyse multi-bloc a permis d’identifier des associations entre les métabotypes de P. aeruginosa et l'expression des phénotypes de virulence. (a) Résumé du programme de travail d’analyse statistique multi-bloc. (b) Représentation de 3 clusters HCPC d'isolats exprimant des profils métaboliques similaires (ou métabotypes) dans les 2 premières composantes principales de l’anlayse multi-factorielle (ou MFA). Les centroïdes des clusters sont représentés par des points plus grands. (c) Vue simplifiée de la voie de synthèse des polyamines (putrescine, spermidine) (adapté de Stalon et al. 246). Les métabolites significatifs sont mis en évidence par des flèches, indiquant si le métabolite se trouve en plus ou moins grande abondance dans le métabotype correspondant à la couleur. (d) Représentation de 3 clusters HCPC d'isolats exprimant des phénotypes de virulence similaires dans les 2 premières composantes principales de l'analyse des correspondances multiples (ACM). Les centroïdes des clusters sont représentés par des points plus grands. (e) Représentation des catégories de virulence dans les 2 premières composantes principales de l'ACM. (f) Dendrogrammes et résumé des principales caractéristiques des clusters HCPC identifiés sur chaque bloc de données et associations entre le niveau de virulence de P. aeruginosa et le métabotype (les valeurs p du test de Fisher <0,05 sont indiquées par (*)). (g) Boxplots montrant les relations bivariées entre les niveaux de putrescine et de spermidine avec l'expression des facteurs de virulence individuels (les valeurs p du test t de Student <0,1 et <0,05 sont indiquées par (§) et (*), respectivement.

 

Des associations significatives entre les niveaux de virulence établis et les métabotypes ont été observées : le métabotype 1 correspond aux isolats avirulents ; le métabotype 2, aux isolats modérément virulents ; et le métabotype 3, aux isolats hautement virulents (test exact de Fisher, valeur p = 0,01, Figure 3f). Considérant que la voie métabolique des polyamines était parmi les plus discriminantes entre les différents métabotypes, les relations entre les phénotypes de virulence et l'intensité de la putrescine et de la spermidine ont été étudiées plus en détail. L'analyse des relations entre le niveau de ces 2 métabolites et les propriétés de virulence a révélé que les niveaux de spermidine étaient significativement plus élevés dans les isolats qui étaient cytotoxiques sur les macrophages J774 et significativement plus bas dans les isolats formant des colonies mucoïdes. De plus, les niveaux de spermidine et de putrescine étaient plus élevés dans les isolats à croissance rapide (valeur p des tests t de Student <0,05). En conclusion, la production de polyamines semble plus forte chez les isolats les plus virulents, incluant la capacité de croissance (Figure 3g) (Moyne et al. 2020).

Polyamines et exacerbations cliniques fréquentes

Les dossiers cliniques des patients muco ont été utilisés pour construire des indicateurs cliniques de la santé respiratoire afin d'explorer les relations entre les métabotypes de P. aeruginosa et mesure de la fonction pulmonaire des patients. Le suivi temporel du volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) et les comparaisons avec une population de référence est considéré comme l’indicateur de pronostic le plus fiable chez les patients atteints de mucoviscidose. Trois indicateurs décrivant le niveau moyen (élevé ou faible), la dynamique à long terme (déclin ou pas de déclin) et à court terme (stable ou instable) des fonctions pulmonaires des patients ont donc été construits sur la base de toutes les mesures du VEMS effectuées pendant la période 2010-2015 (5-45 mesures par patient). Aucune relation statistique n'a été observée entre ces 3 indicateurs, confirmant qu'ils étaient des descripteurs non redondants de l'état de santé respiratoire du patient. De manière remarquable, une association significative entre la production de putrescine et de spermidine par les isolats de P. aeruginosa cultivés, et la dynamique à court terme de la fonction respiratoire du patient (test de Wilcoxon, p-values = 0,030 et 0,041 pour les associations entre un VEMS instable et les niveaux de putrescine et de spermidine, respectivement) a été observée. Ces relations significatives ont montré, pour la première fois, que les biomarqueurs métabolites spécifiquement produits par P. aeruginosa sont corrélés à la fréquence des exacerbations cliniques aiguës de la maladie respiratoire du patient. Compte tenu des inférences statistiques des résultats décrits dans la Figure 4, cette relation pourrait être liée à l'expression de facteurs de virulence dans les isolats de P. aeruginosa.

En conclusion, nous avons trouvé une corrélation majeure et significative entre une production élevée de putrescine et de spermidine par les isolats de P. aeruginosa, et l'expression de plusieurs phénotypes de virulence, ainsi qu'une fonction pulmonaire instable. Il convient de noter que la fonction pulmonaire hautement instable se réfère le plus souvent à un phénotype clinique particulièrement grave d'"exacerbations fréquentes". Nous continuons de poursuivre ces investigations et essayons d’étudier les relations causales et non de corrélation entre production de polyamines et virulence. Projet soutenu par l’association Vaincre la mucoviscidose (RF20210502854).

 

Nous envisageons toujours le développement d’applications médicales :

  • Le Vaccin anti-Pseudomonas aeruginosa : Projet MMAVax (https://www.linksium.fr/projets/mmavax)

Nous avons développé un vaccin anti-Pseudomonas aeruginosa (Figure 4). Il s’agit d’un vaccin vivant atténué qui permet la présentation de l'ensemble du répertoire antigénique aux cellules immunitaires de l'hôte, imitant ainsi ce qui se passe lors des infections à P. aeruginosa. Grâce à un traitement photochimique MMA et à un système d’ingénierie et de contrôle du SST3, nous avons atténué la toxicité de la souche, permettant d’envisager son utilisation chez l’homme, et démontrer l’efficacité de ce vaccin anti-P. aeruginosa (MMAVax) de part sa réponse immunitaire humorale contre plusieurs antigènes pertinents de P. aeruginosa et sa réponse cellulaire spécifique de type Th1 et Th17.

Figure 4 : Schéma de fonctionnement du vaccin P. aeruginosa (BacVac). Contrôle de l’expression du SST3 et de l’antigène d’intérêt de la souche vaccinale BacVac par l’ajout de l’inducteur, isopropyl b-D-1- thiogalactopyranoside (IPTG), qui permet l’activation de l’expression d’ExsA, activateur transcriptionnelle principal du SST3 (gène présent sur le plasmide pEAi354). Site multiple de clonage dans le plasmide pEAi permettant la fusion transcriptionnelle de exoS1-54 et un gène d’intérêt.

Les métabolites et donc l’environnement chimique dans l’intestin est crucial pour le maintien de l’homéostasie immunitaire. En cas de dysbiose, l’abondance relative de certaines espèces bactériennes peut altérer les concentrations de tels ou tels métabolites et entraîner un dérèglement de l’immunité. Au laboratoire TIMC, et dans notre équipe en collaboration avec d’autres équipes du TIMC (Équipe SYNABI par exemple), nous avons envisagé capturer l’empreinte chimique émise par un microbiote sain au sein de l’intestin grèle et restaurer cet équilibre par différents moyens.

  • Projet Capsule de prélèvement développé par Pelican Health. Nous accueillons dans notre groupe, Alexandre Tronel, qui réalise une thèse CIFRE (2020-2023).
  • Projet SentinHealth (Resp. Pr P. Cinquin): Le principe de ce projet repose sur le développement d’un symbiote artificiel, un dispositif médicale posé lors d’un acte chirurgical (par exemple lors de la pose d’un anneau gastrique chez la personne obèse) sur lequel on cultive en amont un microbiote issu d’un individu sain. L’idée étant de réaliser une greffe de microbiote en offrant le support (comme une ancre ou éponge marine) facilitant la croissance et surtout facilitant la persistance des microorganismes.
  • Probiotiques et biomédicaments vivants :

Enfin, récemment nous avons élargi notre arsenal de modulation du microbiote à l’utilisation de probiotiques. L’utilisation de bactéries en tant que « biomédicaments vivants » comme nous l’avons vu pour l’immunothérapie active représente une voie de recherche vers des solutions thérapeutiques extrêmement prometteuses. En effet, le « biomédicament vivant »  est défini comme issu de source naturelle, et vivant, et constitue une nouvelle génération de médicaments à fort potentiel thérapeutique. Les biomédicaments vivants sont des probiotiques avec des allégations de santé, validés dans un protocole de recherche clinique. Leur développement est devenu possible grâce aux dernières avancées scientifiques et technologiques et notamment à l’avancée des connaissances dans le domaine des interactions des micro-organismes constituant un microbiote mais aussi dans les interactions entre les micro-organismes et l’hôte, notamment via leurs métabolites. Par exemple, l’explosion de la commercialisation des probiotiques illustre en partie le besoin des patients et le bénéfice qu’ils éprouvent à consommer ces bactéries. Leur développement pour des applications en santé en tant que des “pharmabiotiques médicaux” ne sera possible que par une meilleure connaissance de leur effet positif sur le microbiote intestinal et in fine sur l’organisme (au niveau digestif, métabolique et immunitaire). C'est sur quoi travaille Clément CAFFARATTI, doctorant en 3ème année dans notre équipe.

Financements           

  • 2022-2025: Fondation UGA (Projet IDIVIA Met) (avec le soutien de la Fondation Air Liquide)
  • 2023-2023 : CI SATT Linksium (Projet MMAVax-NEWCO)
  • 2022-2025 : ANR-21-CE45 (projet AMN)
  • 2022-2021 : FINOVI AO COVID
  • 2019-2022 : Fondation UGA (projet BIOMARCOVID)
  • 2020-2022 : Maturation SATT Linksium (projet MMAVax)
  • 2021 VLM Projet Polyamines et virulence Grant #RF20210502854
  • 2019 Projet Métabolomique et virulence Grant #RF20190502416
  • 2018 Projet Kynurénines et virulence Grant #RF20180502189